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Ce mois-ci, nous explorons le quartier historique du Sault-au-Récollet, l’un des quartiers les plus hantés de la rive nord de Montréal.
Recherche hantée
Une série de troublants événements récents, tels qu’une tentative de sacrifice animal dans un cimetière et l’abandon d’un corps dans un parc naturel local, a incité Montréal hanté à enquêter sur Sault-au-Récollet.
Situé à la limite est de l’arrondissement d’Ahuntsic-Cartierville, Sault-au-Récollet est l’un des nombreux quartiers hantés de Montréal. Situé sur la Rivière-des-Prairies, il est l’un des plus anciens peuplements coloniaux de la ville.
Historiquement, Sault-au-Récollet est le site de l’une des plus anciennes églises de Montréal, de plusieurs cimetières inquiétants et d’un fort colonial qui servait à évangéliser les peuples autochtones. Aujourd’hui, une activité paranormale émane de ce quartier qui est également le siège de légendes retorses qui remontent à l’époque de la Nouvelle-France.
La région où se situe aujourd’hui Sault-au-Récollet était autrefois un lieu très fréquenté par les autochtones. Un sentier de portage serpentait le long de la rive pour contourner les rapides et il s’agissait également d’un lieu de chasse, de pêche, de campement et de commerce.
Pendant des milliers d’années avant l’arrivée des colons européens, cet endroit était un lieu important pour la Première nation Kanien’kehá:ka (Mohawk).
D’autres peuples autochtones ont également utilisé la région pendant leurs déplacements autour de l’île de Tiohtià:ke ou lors du commerce de fourrures et d’autres marchandises dans les environs.
Par conséquent, ce site important a été visité dès le début de la période coloniale par des explorateurs français et des missionnaires catholiques zélés. Tant les récollets que les prêtres jésuites avaient pour objectif de pénétrer profondément dans les territoires autochtones pour tenter de convertir tout le monde au catholicisme.
En 1615, les prêtres récollets Denys Jamet et Joseph Le Caron célébrèrent la première messe catholique sur l’île de Tiohtià:ke, dans l’actuel Sault-au-Récollet.
Samuel de Champlain, aussi connu sous le nom de « Père de la Nouvelle-France » en raison de la fondation de la ville de Québec en 1608, était présent à la cérémonie.
Cette messe inaugurale préfigurait les horreurs que l’Église catholique allait commettre à l’encontre des peuples autochtones dans ce lieu et bien au-delà.
Un autre événement marquant se produisit sur le site le 25 juin 1625. De retour d’une mission d’évangélisation en territoire huron-wendat, le missionnaire récollet Nicolas Viel et son compagnon Ahuntsic tentent de franchir la dangereuse voie d’eau. Cependant, à cause des eaux tumultueuses de la dernière série de rapides, leur canot chavire et ils se noient tous les deux.
À la suite de cet incident, les autorités de l’Église catholique nomment la région Sault-au-Récollet. Dénaturant tous les faits, les autorités catholiques déclarèrent que Nicolas Viel fut un martyr, délibérément assassiné par des Hurons-Wendat opposés à sa mission évangélique.
Elles prétendirent également qu’Ahuntsic était un Huron-Wendat qui s’était converti au catholicisme sous la direction du père Viel.
Ces idées fausses conduisirent à l’érection de statues, de monuments commémoratifs et de tableaux à la gloire des dévots du père Viel et d’Ahuntsic, au détriment des peuples autochtones.
Cependant, des centaines d’années plus tard, ces mensonges seront démentis par des historiens respectés et dénoncés par diverses organisations. Selon certaines hypothèses, Ahuntsic était en fait un Français et les preuves historiques démontrent que leur mort sur la rivière était un accident et non une attaque délibérée de la part des autochtones.
Cette fiction a également donné naissance à une légende raciste datant de l’époque de la Nouvelle-France, connue sous le nom de « légende du sauvage mouillé ».
En bref, la légende parle d’un sorcier indigène qui, les nuits sans lune, apparaît au bord de la rivière, trempé de la tête aux pieds. Il est assis, immobile, près d’un feu de camp qui ne dégage ni chaleur ni fumée. Ses vêtements sont trempés, mais l’eau se volatilise mystérieusement avant de dégoutter sur le sol. Ce personnage inquiétant serait l’esprit du sorcier qui a assassiné le père Viel et Ahuntsic en 1625.
Le mythe prétend que le sorcier et ses sbires attaquèrent le père Viel et Ahuntsic dans leur canot, avant de les démembrer et de jeter les morceaux de leur corps dans les rapides. Ce faisant, le sorcier perdit pied et se noya. En châtiment de son crime odieux, l’âme du sorcier fut maudite, condamnée à errer sur les rives du fleuve, éternellement trempée et grelottante.
La légende prétend que, certaines nuits, le « sauvage mouillé » peut encore être aperçu, sa forme spectrale surgissant près des rapides, toujours frissonnant dans la brume. La légende prétend qu’il reste inoffensif pour ceux qui le rencontrent.
Certaines versions de cette légende dérangeante se trouvent dans les ouvrages Les Soirées Canadiennes (1863) et Créatures fantastiques du Québec (2007).
Les « meurtriers » du père Viel et d’Ahuntsic sont décrits tantôt comme des Hurons-Wendat, tantôt comme des « Iroquois » (terme français désignant la confédération des Haudunosonee, qui comprend la Première nation mohawk).
En 1696, les autorités sulpiciennes ordonnent la construction du fort de Lorette sur le site de Sault-au-Récollet.
L’objectif de cette structure était de servir de nouveau pensionnat pour endoctriner les peuples autochtones. L’ancien établissement, fort de la Montagne, est jugé trop près de la colonie de Ville-Marie. Elle était située sur les pentes du Mont-Royal.
Les Sulpiciens prétendaient que ce déménagement était motivé par la facilité d’accès à l’alcool. Dans les faits, cette première école fortifiée s’est heurtée à une forte résistance en raison de ses efforts d’endoctrinement à l’encontre des peuples autochtones.
Le fort Lorette formait un quadrilatère avec des bastions en pierre aux angles. Il mesurait environ 160 x 500 pieds.
La chapelle était située à l’angle Est et servait de rempart. Il y avait également une résidence pour les missionnaires, un couvent, des hébergements pour les autochtones et un bâtiment pour entreposer la poudre à canon, les munitions et les armes. Environ 400 personnes vivaient sur le site, principalement des autochtones en voie d’endoctrinement.
Par un cruel revirement, le sentier qui menait de Ville-Marie au fort de Lorette fut baptisé Chemin des sauvages pour désigner le déplacement des autochtones depuis le fort de la Montagne.
Pour ne rien arranger, un cimetière fut établi à l’extérieur des murs de forte Lorette pour tous les autochtones qui mourraient lors de leur séjour dans cet établissement.
En 1721, fort Lorette cessa d’être un pensionnat lorsque la mission fut déplacée à l’emplacement actuel de Kanesatake.
Pour la deuxième fois, les autochtones furent déménagés par l’ordre des Sulpiciens dans le but de les éloigner de la colonie de Ville-Marie.
Les Sulpiciens entreprirent la construction d’une église à l’est du fort de Lorette. Appelé église de la Visitation de la Sainte Vierge, le lieu de culte fut l’œuvre d’un prêtre du nom de Père Guillaume Chambon. La construction se déroula de 1749 à 1951. Monseigneur de Pontbriand, évêque de Québec, consacra l’église en 1752.
La construction de l’église de la Visitation allait rapidement donner naissance à une autre légende étrange de la Nouvelle-France. Intitulée « Le cheval blanc de Sault-au-Récollet », cette histoire est l’un des grands classiques du folklore québécois.
La légende décrit un mécréant qui refusait d’aller à l’église et se moquait quotidiennement de la religion catholique. Le voyant blasphémer sans cesse, ses voisins de Sault-au-Récollet s’attendaient à ce que Dieu le punisse de quelque malheur. Un jour, en effet, l’homme disparut soudainement, de même que son grand cheval blanc. Il faut savoir que l’animal était son bien le plus précieux.
Le cheval blanc finit par réapparaître dans le voisinage, mais il était très farouche et violent et inspirait la frayeur. Il défonçait les champs, renversait les poteaux de clôture et poursuivait les habitants terrifiés dans les rues et les champs.
Certains voisins soupçonnaient que l’homme et sa bête étaient devenus un seul et même corps en guise de punition pour les péchés qu’il avait commis.
À l’époque, le curé de Sault-au-Récollet essayait désespérément de construire une nouvelle église. À l’insu de tous, il fit fabriquer une bride avec un mors en forme de croix et réussit à la passer à la bête. Soudain, le cheval devint aussi doux qu’un mouton. Il fut possible d’atteler l’animal et de lui faire tirer les lourdes pierres nécessaires à la construction de l’église.
Le prêtre avait prévenu les ouvriers de ne pas enlever la bride de l’animal et de ne pas lui donner d’eau. Cependant, l’un d’entre eux a eu pitié de la bête assoiffée et affaiblie alors qu’il ne restait plus qu’une pierre à installer au-dessus de la porte de l’église. L’ouvrier compatissant retira la bride de l’animal pour lui permettre de s’abreuver à un ruisseau voisin.
Soudain, l’animal redevint féroce, brisa son harnais et s’enfuit, terrorisé, vers l’ouest, le long de la rivière des Prairies. Il parcourt près de quatre lieues avant de se jeter dans les eaux tumultueuses. Depuis, ces tourbillons, au large de Roxboro, ont pris le nom de rapides du Cheval Blanc.
Selon la légende, la dernière pierre au-dessus de la porte de l’église n’a fut jamais été posée correctement et pourrait incessamment déclencher l’effondrement de la structure.
Aujourd’hui, cette légende est illustrée dans un parc et par une statue de cheval érigés dans un rond-point à l’extrémité nord du boulevard des Sources, où se trouve le rapide du Cheval Blanc.
De plus, après la conquête britannique de 1760, les autorités se rendirent rapidement compte que le fort de Lorette ne présentait que peu d’avantages stratégiques. C’est ainsi qu’en 1812, le fort fut démoli.
En ce qui concerne les cimetières de la région, il existait à l’origine un cimetière indigène à fort Lorette, ainsi qu’un cimetière catholique à l’église de la Visitation.
Le cimetière autochtone a dû être fermé après le déménagement du pensionnat de fort Lorette, tandis que le cimetière paroissial catholique de l’église fut abandonné en 1873 parce qu’il était trop petit pour accueillir la population croissante de la région en cours d’urbanisation.
C’est ainsi que le cimetière de Sault-au-Récollet fut aménagé en 1873. Le nouveau cimetière se situe à quelques rues au sud de l’église de la Visitation. Le cimetière est bordé par le boulevard Henri-Bourassa, la rue Taché, l’avenue Camille-Paquet et le Sentier des Sauvages. Ce sentier au nom raciste, vestige du sentier d’origine, relie la rue Garnier au boulevard Henri-Bourassa.
Récemment, le cimetière de Sault-au-Récollet a connu une activité inquiétante. En novembre 2024, un coq à l’œil droit crevé fut retrouvé errant parmi les cryptes et les pierres tombales. Sauvé par la SPA, l’oiseau fut baptisé Freddy.
Des ouvriers découvrirent également une cage ainsi que des bougies et d’autres objets rituels dans le cimetière, ce qui laissa supposer que Freddy aurait survécu à une tentative de sacrifice animal.
Un habitant du coin pense que quelqu’un a tenté de sacrifier Freddy lors d’un rituel vaudou. Il invoque le fait qu’il avait découvert des carcasses de coqs décapités il y a une vingtaine d’années dans le parc naturel de l’Île-de-la-Visitation, situé à proximité.
Le parc naturel de l’Île-de-la-Visitation a lui aussi été le théâtre d’activités troubles ces derniers temps. Le 30 octobre 2024, un corps en décomposition, pieds et mains liées, a été découvert dans le parc, près de l’intersection du boulevard Gouin Est et de la rue de Lille.
La police a confirmé qu’il s’agissait du cadavre de Kevin Mirshahi, un influenceur de cryptomonnaies qui avait été enlevé dans un condo de luxe du Vieux-Montréal le 21 juin 2024.
La raison pour laquelle les criminels ont choisi de jeter son corps dans le parc naturel de l’Île-de-la-Visitation est inconnue à ce jour.
Compte tenu de sa longue histoire, Sault-au-Récollet a reçu le statut de site patrimonial par la Ville de Montréal en 1992. Le gouvernement du Québec a emboîté le pas en 2018 en désignant le quartier comme lieu historique à la suite des travaux archéologiques menés sur les vestiges du fort Lorette en 2017.
Depuis la désignation historique, la zone a connu un changement notoire. Après consultation de la communauté mohawk de Kanesatake, l’offensif Chemin des sauvages a été rebaptisé en 2020.
Le sentier au nom raciste a été rebaptisé sentier Tetewaianón:ni Iakoiánaka’weh, ou « sentier des messagers » en kanien’keha (la langue mohawk).
Le sentier Tetewaianón:ni Iakoiánaka’weh fait référence aux anciens sentiers empruntés par la nation Kanien’kehá:ka (Mohawk) sur Tiohtià:ke, également connue sous le nom de Montréal. Ces sentiers utilisés depuis des milliers d’années ont été taillés par les messagers Onkwehón:we (Premières Nations) qui parcouraient ces chemins utilisés pour la chasse, le commerce et la communication entre les villes et les villages.
Sault-au-Récollet est sans aucun doute l’un des secteurs les plus hantés de la rive nord de Montréal. Bien que ce blogue ne fait qu’effleurer la surface de l’histoire mouvementée et des problèmes persistants du quartier, il ouvre de nouvelles pistes de recherche. Où se trouve le cimetière indigène oublié situé sur le site du Fort Lorette ? Quelles autres activités paranormales sont associées à l’église et aux cimetières locaux ? Quelle est l’ampleur du vaudou dans le quartier ? Etc. Seuls le temps et des recherches plus approfondies dévoileront les véritables mystères et les horreurs qui se cachent derrière Sault-au-Récollet.
Nouvelles de la société
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À venir le 13 janvier 2025 : Mise à jour su sujet de l’ancien hôpital Royal Victoria
En février 2018, Montréal hanté a réalisé un reportage sur l’ancien hôpital Royal Victoria et ses nombreux fantômes. Construit en 1893 dans le style baronnial écossais, l’hôpital hanté a fonctionné pendant plus d’un siècle avant d’être finalement fermé et relocalisé en 2015. Aujourd’hui, l’Université McGill tente de le réaffecter. Baptisé « New Vic », le projet propose un nouveau campus dédié au travail interdisciplinaire. Cependant, le processus a été ébranlé par un conflit avec les Mères Mohawk, qui estiment que des enfants autochtones pourraient être enterrés à proximité. La question se pose également de savoir ce qu’il faut faire de tous les fantômes qui subsistent dans l’ancien hôpital.
Auteur :
Donovan King est un historien postcolonial, il est également enseignant, guide touristique et acteur professionnel. En tant que fondateur de Montréal hanté, il combine ses compétences pour créer les meilleures histoires de fantômes, se déroulant à Montréal, à la fois en écriture et en théâtre. King est titulaire d’un DEC (théâtre professionnel, collège John Abbott), d’un baccalauréat en Beaux-Arts (théâtre dramatique en éducation, université de Concordia), d’un baccalauréat en éducation (histoire et enseignement de l’anglais, université de McGill), d’une maîtrise en théâtre (université de Calgary) et d’AEC (Montréal guide touristique, Institut de tourisme et d’hôtellerie du Québec). Il est également certifié comme Spécialiste de Destination Montréal.
Traductrice :
Claude Chevalot détient une maîtrise en linguistique appliquée de l’Université Mcgill. Elle est rédactrice, réviseure et traductrice. Depuis plus de 15 ans, elle se consacre presque exclusivement à la traduction littéraire et à la traduction de textes sur l’art actuel et contemporain.
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